On dit souvent que le Web3 est “l’internet de la valeur”. Depuis les années 2000, Internet a grandement facilité la création et diffusion d’information dans le monde. Aujourd’hui, les technologies blockchain veulent faciliter la propriété, traçabilité et l’échange de nos biens à l’échelle mondiale.

Dans quelques années vous pourrez, en quelques clics, acquérir une fraction d’un appartement à New York ou Tokyo et utiliser cet actif numérique en garantie pour obtenir un crédit presque instantanément en ligne, sans passer par les cases traditionnelles qui peuvent durer plusieurs mois.

Mais saviez-vous que l’immatériel peut aussi être valorisé et échangé ?

C’est la promesse de la « tokenisation ».

Un rapport publié par le Boston Consulting Group (BCG) estime que le marché de la tokenisation pourrait atteindre 16 000 milliards de dollars d’ici 2030.

Aujourd’hui encore à ses balbutiements, ce phénomène pourrait bien constituer une source de valeur considérable à l’échelle mondiale et contribuer à rendre les marchés de capitaux plus efficaces et plus équitables.

On vous explique tout dans cet article.

Qu’est-ce que la tokenisation ?

Le terme « tokenisation » est un moyen de sécuriser des données du monde réel ou immatériel grâce à une blockchain. Cela revient à encapsuler des actifs, comme une maison, une oeuvre d’art réelle ou numérique, une newsletter ou encore une licence dans un actif numérique.

Par exemple, la société Circle émet la cryptomonnaie « USDC ». C’est une version tokenisée de l’USD, le dollar américain, aussi appelée stablecoin. Pour ce faire, Circle doit stocker dans ses réserves une quantité X de dollars pour émettre en parallèle la même quantité X  d’USDC, c’est ce que l’on appelle un « token ».

Qu’est-ce qu’un « token » ? Quel intérêt ?

Habituellement, la propriété des actifs est représentée par un morceau de papier. Ce morceau de papier est un symbole de propriété de l’actif en question.

• Maison ou immeuble : un acte papier
• Voiture : un titre papier
• Action : un certificat papier
• Obligation : un billet de trésorerie papier
• Espèce : un papier dollar / euro / peso

Cela fait beaucoup de papier… on se demande pourquoi les actes de propriété ne sont pas encore en format numérique ?

Le problème est que sur internet, tout est duplicable (photo, texte, vidéo, …). Si j’achète une maison en ligne, c’est un peu problématique si mon voisin a la possibilité de s’approprier mon titre de propriété et le vendre à ma place. C’est là que la blockchain et les tokens ont de l’intérêt.

Un token est une possession numérique, émis sur une blockchain, pouvant représenter tout et n’importe quoi. Contrairement à la plupart des fichiers, images ou données sur les ordinateurs ou sur Internet, les tokens ne peuvent pas être dupliqués. Lorsque vous envoyez un token à quelqu’un, vous ne pouvez pas en conserver vous-même une copie.

Les tokens, en tant que véhicule numérique d’un actif sous-jacent, vont jouer un rôle fondamental pour tout ce qui concerne l’échange de valeur. Ils intègrent les droits rattachés à leurs sous-jacents.

Les bénéfices

Un token est programmable au moyen de smart-contracts (instructions informatiques permettant d’automatiser des flux financiers via une blockchain), ouvrant ainsi la voie à de vastes possibilités en termes de démocratisation, automatisation et réduction de coûts.

• Fractionnement : Les actifs tels que les biens immobiliers ont un obstacle élevé à l’entrée en raison de l’important capital initial requis. Le fractionnement de ces actifs démocratise l’accès des investisseurs de détail et des petits investisseurs.
• Economique : Les coûts peuvent être considérablement réduits en éliminant certains intermédiaires.
• Atténuation de la fraude : En utilisant des bases de données de blockchain immuables, le risque est atténué.
• Suppression de tiers de confiance : Les smart-contracts automatisent des étapes telles que la conformité, la vérification des documents, le trading…
• Délais de règlement plus rapides : Les smart-contracts déclenchés par des paramètres prédéfinis peuvent effectuer instantanément des transactions.

En quoi est-ce novateur ?

Le potentiel de cette technologie est théoriquement illimité, puisque tout actif peut prétendument être « mis sur la blockchain ». C’est toutes les classes d’actifs qui pourraient être impactées dans les années à venir. Boston Consulting Group estime ainsi que ce marché pourrait atteindre, à lui seul, les 16 000 milliards de dollars d’ici à 2030. Sachant que le marché crypto dans son entier pèse actuellement environ 1 000 milliards de dollars.

Les premières expérimentations se font aujourd’hui du côté des marchés considérés « peu liquides » qui demande des capitaux importants à l’entrée : marché de l’art, métaux précieux, investissement privée… et bien sûr l’immobilier.

Aujourd’hui, il est possible d’acheter des fractions de biens immobiliers sur le territoire américains. Vous pouvez ainsi investir dans l’immobilier dès 50$ aux Etat-Unis, mais potentiellement, dans un futur proche n’importe où dans le monde.

En tant que co-propriétaire, vous percevez une partie proportionnelle du loyer. En transformant l’immobilier en jetons numériques, ce marché devient accessible à un nombre beaucoup plus grand d’acheteurs potentiels, à la fois en raison du fractionnement des jetons et de la portée potentielle des marchés mondiaux, rendu accessible par Internet.

Au-delà des marchés peu liquides, la liste des actifs qui pourraient être tokenisés semble presque infinie, allant des titres traditionnels (forex, equity, obligations, commodités,…) jusqu’aux équipes sportives, en passant par les produits de luxe, les voitures, les brevets, les licences et, au final, tout type d’actif pour lequel la propriété fractionnée est possible.

Défis et opportunités

Quoi qu’il en soit, la tokenisation des actifs est amenée à changer les dynamiques actuelles régissant les marchés financiers dans les décennies à venir. Elle diminue les barrières financières pour les petits investisseurs, en ouvrant de nouveaux marchés avec le potentiel de faire tomber les barrières à l’investissement. Une bonne éducation financière sera ainsi nécessaire auprès de ces nouveaux investisseurs.

La tokenisation ouvre des cas d’usages nouveaux et la voie à des modèles de distributions innovants.

Néanmoins le chemin est encore long avant de voir une adoption à grande échelle de la tokenisation.

• Comment s’assurer qu’un actif numérique est bien détenu 1 pour 1 dans la réalité ? (Opportunités d’arbitrage de marché)
• Comment rendre les technologies actuelles stables, interopérables et assez simples pour être utilisées par la masse ?
• Quel cadre légal adopter pour ces nouvelles classes d’actifs et technologies ?
• Comment éviter le risque de cyber-attaques ? Comment garantir la protection de la vie privée tout en évitant le risque d’usurpation d’identité ou blanchiment d’argent ?

Finalement, ce sont toutes les frontières entre le monde physique et numérique qu’il faut repenser, dans un monde où les images réelles et fictives s’estompent.

Source :

Etude OECD: https://www.oecd.org/finance/The-Tokenisation-of-Assets-and-Potential-Implications-for-Financial-Markets.pdf

Etude Boston consulting group: https://web-assets.bcg.com/1e/a2/5b5f2b7e42dfad2cb3113a291222/on-chain-asset-tokenization.pdf

Site de RealT: https://wiki.realt.co/v/francais/far/quels-sont-les-avantages-de-limmobilier-tokenise

Article LaTribune: https://www.latribune.fr/opinions/tribunes/la-tokenisation-des-actifs-materiels-va-permettre-l-emergence-d-un-nouveau-systeme-financier-941828.html