Let’s Talk – GĂ©raldine Karolyi : la passion du design
Fondatrice de lâagence de brand design 17mars, GĂ©raldine Karolyi rĂ©pond Ă des clients prestigieux depuis plus de 20 ans. Si les solutions proposĂ©es sont absolument design, alliant esthĂ©tique et fonctionnalitĂ©, GĂ©raldine nâoublie pas pour autant ce qui lâanime depuis toujours : la crĂ©ation artistique pure. AprĂšs avoir fait ses armes Ă la tĂ©lĂ©vision, 17mars sâadresse aujourdâhui Ă tous les secteurs en tant quâexperte de la marque en mouvement et des nouveaux contenus digitaux.
En 2021, la hype des NFT et du mĂ©tavers ont plongĂ© GĂ©raldine dans le Web3 au point de la dĂ©cider Ă crĂ©er « 1703 », hub dâart numĂ©rique destinĂ© Ă fĂ©dĂ©rer les marques et les artistes autour de projets ambitieux et singuliers.
Avec beaucoup dâĂ©nergie, dâambition, mais aussi dâhumilitĂ© et dâauthenticitĂ©, nous avons parlĂ© dâart, de Web3, et de leurs implications pour le design et le branding.
Table des matiĂšres
Letâs talk ! Feat. GĂ©raldine Karolyi
Géraldine, peux-tu te présenter succinctement ?
Bonjour, je suis GĂ©raldine Karolyi, je suis la fondatrice et la directrice de crĂ©ation de lâagence de design de marque 17mars. Jâai Ă©tudiĂ© les Arts appliquĂ©s Ă lâĂ©cole Penninghen, Ă Paris. Je travaille depuis plus de 20 ans dans le secteur des mĂ©dias et de la communication. Je me passionne pour les interconnections entre lâart et le design, leur rapport Ă la sociĂ©tĂ©, leur nĂ©cessitĂ©, le processus crĂ©atif.
Comment as-tu découvert la blockchain et les NFT ?
Câest un premier projet que nous avons rĂ©alisĂ© pour Ledger qui mâa mis le pied Ă lâĂ©trier. Et en tant que designer, je ne peux pas mâengager auprĂšs dâun client sans comprendre son mĂ©tier et son Ă©cosystĂšme.
Je me suis ensuite beaucoup documentĂ©e pour intĂ©grer ce quâimplique la blockchain dans mon domaine : la crĂ©ation visuelle. Faire la part des choses entre ce qui relĂšve fondamentalement du punk, de la spĂ©culation ou de lâamour de lâart.
Comment expliques-tu lâintĂ©rĂȘt des NFT aux personnes sceptiques ?
Expliquer lâintĂ©rĂȘt dâun contrat ou dâune transaction ne me passionne pas plus que ça !! Je prĂ©fĂšre parler du phĂ©nomĂšne NFT comme dâun coup de projecteur sur le travail des artistes numĂ©riques, jusquâici nĂ©gligĂ©s par le marchĂ© de lâart.
Mais ce qui me concerne plus directement en tant que designer, câest le deuxiĂšme impact de ce coup de projecteur : lâintĂ©rĂȘt que les arts numĂ©riques suscitent chez les marques. Ces derniĂšres ont les moyens de soutenir des artistes et de contribuer Ă la diffusion de la culture artistique en gĂ©nĂ©ral.
Plus largement, quâest-ce que le Web3 de ton point de vue ?
Câest lâannonce dâune Ă©tape majeure dans le dĂ©veloppement des moyens nous permettant dâaccĂ©der Ă la connaissance, qui se caractĂ©rise notamment par les interconnections entre lâhomme la technologie. En ce sens, je partage le point de vue de certains qui le comparent Ă une seconde Renaissance : comme si la vitesse des processeurs avait remplacĂ© la presse de Gutenberg.
Mais cette accĂ©lĂ©ration exponentielle de la tech, qui nous invite Ă basculer dans une autre dimension, nâest pas sans impact sur notre cerveau, notre quotidien, et la planĂšte.
Le Web3 est donc avant tout une grande question ! Chaque jour, nous choisissons un peu plus ce Ă quoi nous voulons que ressemble notre monde demain. Pour ma part je mâengage pour la valorisation des mĂ©tiers de designer et dâartiste ; dans cette construction nouvelle, nous sommes tout autant artisans que chercheurs. Nous Ćuvrons pour simplifier les usages, rĂ©vĂ©ler les Ă©motions, Ă©veiller les esprits.
Le mouvement actuel repousse les murs et les limites de la crĂ©ation. Je veux parler du design des interfaces et des espaces mais aussi des nouvelles perspectives qui sâouvrent pour les artistes. Ce que je souhaite, câest sensibiliser les marques Ă lâintĂ©rĂȘt de travailler avec les designers et les artistes dans une optique Web3 : les uns et les autres peuvent se retrouver autour dâun mĂȘme message, tant sur le fond que sur la forme. Si lâobjectif du travail du designer est dâĂȘtre beau et efficace, lâartiste lui a le courage dâexprimer un point de vue, ce qui me semble vital dâun point de vue sociĂ©tal.
Pour mieux te connaitre, peux-tu nous livrer tes coups de cĆur Web3/NFT etc. ?
Je suis particuliĂšrement touchĂ©e par les artistes numĂ©riques chez qui je dĂ©cĂšle une pratique picturale ou plastique, parce que câest de lĂ dâoĂč je viens. Je mâintĂ©resse à la façon dont la tech vient transcender le geste et le message.
Minter une Ćuvre sur la blockchain a une rĂ©sonnance particuliĂšre. A la notion de propriĂ©tĂ©, sâajoute celle dâĂ©ternitĂ©. Quand le street artiste Pascal Boyart photographie et anime ses Ćuvres pour les convertir en NFT, il questionne aussi la fragilitĂ© dâune fresque murale vouĂ©e Ă disparaĂźtre.Â
CĂŽtĂ© collection, jâai apprĂ©ciĂ© Pixel Blossom dont le principe consistait Ă rĂ©vĂ©ler progressivement lâĆuvre mintĂ©e, pixel par pixel, jour aprĂšs jour. La question du temps et du dĂ©sir est pour moi fondamentale, dans lâart comme dans la vie. Je trouve donc ce concept trĂšs pertinent et dâune grande poĂ©sie.Â
Enfin, jâai un faible pour lâart gĂ©nĂ©ratif : je fais le grand Ă©cart entre Vera Molnar et Joshua Davis, en passant par Monica Rizzoli ou William Mapan que jâai dĂ©couverts au Nft-in cet automne. CĂŽtĂ© plateforme, ma prĂ©fĂ©rence va donc Ă Art Blocks. CĂŽtĂ© collections, il ne faut pas manquer lâhommage rendu Ă Herbert W. Franke ! Lâoccasion pour Jeff Davis de droper la superbe sĂ©rie Rectangles (for Herbert).
En tant que designer expérimentée, pourquoi le Web3 va-t-il marquer durablement les marques ?
Nâest-ce pas plutĂŽt lâinverse ? Câest parce que les marques choisiront des designers expĂ©rimentĂ©s et des artistes visionnaires pour y faire leurs premiers pas quâelles marqueront durablement le Web3 đ
Avant dâĂȘtre designer, tu es avant tout une artiste. Comment rĂ©concilier la passion de crĂ©er avec le besoin dâutilitĂ© du design ?
Câest la question Ă laquelle je tĂąche de rĂ©pondre tous les jours : jâaborde chaque brief client en considĂ©rant son besoin, sans nĂ©gliger mon ambition crĂ©ative, qui reste au cĆur de mon mĂ©tier de designer.
Jâengage nĂ©anmoins en marge des travaux de commande de lâagence de nombreux projets de crĂ©ation et dâexpĂ©rimentation. Grande source de cohĂ©sion et dâinspiration, ces dĂ©veloppements sont moteurs pour lâĂ©quipe et me permettent dâaiguiser ma vision.
Concilier crĂ©ation et utilitĂ©, câest aussi entreprendre⊠Depuis toute petite, je mâalimente dâune mixitĂ© forte : culturelle, sociale, familiale, artistique. Le principal hĂ©ritage de tout cela est une forme dâĂ©nergie crĂ©ative. Câest sans doute ce qui mâa poussĂ© il y a plus de 20 ans Ă crĂ©er mon propre studio de crĂ©ation, devenu une agence de design de marque : 17mars, design for brands. Et Ă crĂ©er aujourdâhui 1703, art for brands, un hub dĂ©diĂ© aux arts numĂ©riques. Brasser les Ă©nergies et les influences est ce qui mâanime.
Enfin, je dĂ©veloppe Ă©galement des projets Ă titre personnel, oĂč la part artistique et intime domine.
Hasard Organique. Design procédural, mouvement perpétuel. ©17mars/17lab
Pourquoi, malgrĂ© sa prĂ©pondĂ©rance dans tous les mĂ©dias depuis plus de 20 ans (print, TV, cinĂ©ma, internet, clips vidĂ©o, concerts), lâart numĂ©rique nâa pas encore acquis ses lettres de noblesse ?
Lâart numĂ©rique existe depuis une soixantaine dâannĂ©e. Il a toujours Ă©tĂ© prĂ©sent dans les musĂ©es, les festivals et les Ă©vĂ©nements, mais il est vrai quâil nâa jamais vraiment intĂ©ressĂ© les collectionneurs, Ă cause des dĂ©fis que reprĂ©sentent sa prĂ©sentation, son exposition ou sa conservation. De plus il nâĂ©tait alors pas toujours facile dâapproche, parce que trĂšs conceptuel.
Ce quâon retrouve, comme vous le dites, dans de nombreux supports, sous une forme plus attractive et accessible, nâest pas Ă proprement parler de lâart, parce quâil a un rĂŽle fonctionnel ou commercial : les spectateurs voient avant tout des images, ou des animations. Câest lâambiguĂŻtĂ© de lâart graphique, qui est considĂ©rĂ© comme un art mineur (ou art appliquĂ©) : on lui prĂ©fĂšre donc le terme de design graphique, ou de motion design.
Aujourdâhui le phĂ©nomĂšne NFT met en lumiĂšre le travail et de certains de ces designers et artistes en leur permettant dâexister sur le marchĂ© de lâart, de sâĂ©manciper du cadre de la commande. Les supports dâexposition sont dĂ©sormais multiples et accessibles.
Mais tout cela est trĂšs rĂ©cent : la technologie NFT, qui concourt Ă donner ses lettres de noblesse Ă lâart numĂ©rique nâa que quelques annĂ©es, et son explosion est relativement rĂ©cente. Or il faut du temps pour sensibiliser les publics et les institutions qui fonctionnent selon des temporalitĂ©s bien diffĂ©rentes. Ceci dit, la dynamique est lancĂ©e : de plus en plus de musĂ©es se targuent dâavoir acquis une Ćuvre NFT, la plupart des grandes maisons de ventes aux enchĂšres ont ouvert un dĂ©partement dâart « numĂ©rique » (comprendre NFT) et les univers immersifs se multiplientâŠ
Lâart numĂ©rique a de trĂšs belles annĂ©es devant lui, et je souhaite y contribuer !
Strange Garden â Lila. Projet dâaffiche, design procĂ©dural interactif. ©17mars/17lab
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Dans une tribune publiĂ©e le 15/09/2022 chez stratĂ©gie.fr, il est mentionnĂ© « En sâappropriant les nouveaux codes liĂ©s Ă lâultra-numĂ©rique, les marques sâintĂ©ressent et sâassocient aux nouvelles formes dâexpressions artistiques. » : peux-tu nous parler de ces nouveaux codes de lâultra-numĂ©rique ?
Je voudrais parler de la digitalisation des usages et des espaces, que lâexpĂ©rience soit IRL ou virtuelle. Petit Ă petit, la tech habite notre quotidien : nous disposons de nouveaux outils pour consommer de nouveaux produits dans de nouveaux espacesâŠTout est nouveau !
Le designer a donc fort Ă faire : il dessine lâinterface, il dĂ©finit le systĂšme et lâartiste enrichit lâexpĂ©rience.
Quel(s) conseil(s) peux-tu donner aux marques face à ces changements ?
Il y a quelques annĂ©es, 17mars a publiĂ© une annonce presse dont lâaccroche Ă©tait « We are hiring brave clients »⊠Cela a pris un peu de temps, mais je suis heureuse de compter aujourdâhui parmi nos clients des marques qui challengent notre crĂ©ativitĂ© et qui ont les moyens de leurs ambitions. Ce qui mâenchante car chez 17mars, nous ne nous rĂ©alisons pleinement quâen relevant de grands dĂ©fis. Je donne donc aux marques le mĂȘme conseil quâĂ mes Ă©quipes : travaillons, soyons dĂ©terminĂ©s Ă faire le pas de cĂŽtĂ© qui transcende, pour ensemble conquĂ©rir et cultiver le meilleur du Web3.
Conclusion
Le point de vue de GĂ©raldine Karolyi, entre rĂ©ponse fonctionnelle du designer et besoin dâexpression vital de lâartiste, est trĂšs Ă©clairant. Sa pratique, largement crĂ©ative et toujours en collaboration avec son Ă©quipe et ses clients, rĂ©concilie ces deux aspects.
LâĂ©mergence du Web3 est un tournant majeur pour les crĂ©atifs et les designers qui peuvent profiter de ce Ă©lan pour sâengager dans des voies plus audacieuses.
GĂ©raldine en est convaincue : câest le moment !
Lien(s) utile(s)
Tribune du 15/09/2022 chez stratégie.fr
Le talk de Géraldine Karolyi lors du Motion Plus Design à Paris, en 2020
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