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Rétrospective de l’industrie vidéoludique à l’aune de la déferlante NFT

Par Dominique PRASIVORAVONG , le 15 décembre 2021 - 16 minutes de lecture

La Team HelloToken est depuis toujours composée de gamers.

Joueurs assumés (on parle de jeux vidéo hein, pas de gambling 🎰), nous avons vécu et observé l’évolution de l’industrie depuis les années 80.

L’arrivée d’Internet a irrémédiablement bouleversé les jeux vidéo. La démocratisation du web depuis le début du millénaire a façonné la génération post-2000. De l’amont à l’aval, tant d’un point de vue des business models que de la conception, de la distribution, des styles de jeux, Internet a tout revu en profondeur.

En cette fin d’année 2021, les NFT nous semblent être un nouveau point d’entrée qui va façonner l’industrie. L’annonce d’Ubisoft de « Quartz » le 7 décembre 2021, qui officialise l’entrée du studio français dans le monde des NFT, nous a paru un signal fort pour vous faire le point sur le sujet.

L’évolution du 10ème art

De la préhistoire aux 80’s

Ceci est un jeu vidéo…

La paternité du 1er jeu vidéo revient à deux ingénieurs du Brookhaven National Laboratory, William Higinbotham, et Bob Dvorak avec « Tennis for Two » en 1958. Mais déjà en 1952, le professeur britannique A.S. Douglas a créé « OXO », un jeu de morpions, dans le cadre de sa thèse de doctorat à l’université de Cambridge.

C’est à partir des années 70 que le secteur accélère : Atari voit le jour en 1972 et sort « Pong » en arcade en novembre de la même année.

De l’autre côté du Pacifique, c’est la même euphorie : Sega a déjà lancé son premier jeu d’arcade « Periscope » en 1966, Taito sort ses premiers jeux en 1972, Namco se lance dans le jeu vidéo en 1974 et Nintendo prend le virage durant ces mêmes années.

C’est durant la décennie 70-80 que sont nés des légendes : Pong, Space Invaders, Pac-Man, Galaxian, Dig-Dug, Xevious etc.

La première console de salon offrant un système multi-jeux sort en 1977 : c’est la révolutionnaire Atari 2600.

Les années 80 sont une période faste en termes de création : Donkey-Kong, Mario Bros, Tetris, Zelda, Bubble Bobble, Double Dragon, Ghouls ‘n Ghost, Maniac Mansion, Prince of Persia et des tonnes d’autres jeux sortent durant cette période.

… Ceci aussi

Les consoles de salon telles que la Famicom/Nes de Nintendo et la Master System de Sega déferlent dans le monde et installent ce nouveau loisir au cœur des foyers, pour ne plus jamais le quitter. Les premiers PC arrivent également et très vite, ils deviennent un support pour jouer.

Les 90’s : « The golden era »

Je suis #TeamSuperFamicom

Les années 90 sont souvent considérées comme l’âge d’or des jeux vidéo.

Elles concordent avec la sortie de la Super Famicom/Super Nes de Nintendo, de la Genesis/MegaDrive de Sega et à un niveau plus confidentiel en termes de ventes (mais tellement légendaire), la NeoGeo AES de SNK, la Rolls Royce des consoles.

A ce moment, les planètes sont alignées : les foyers sont équipés, les consoles de salon sont techniquement suffisamment puissantes pour apporter les sensations de l’arcade à la maison. Les adaptations cinéma en jeux vidéo sont des succès (vrai pour « Le roi lion » ou « Aladdin », beaucoup moins pour « Last Action Hero » 😅) et les studios rivalisent de créativité pour produire des chefs d’œuvres.

L’ère 16 bits passe le flambeau aux consoles 32 bits et à la 3D : Sony entre dans le cercle avec la Playstation en 1994, Sega lui fait face avec la sortie de la Saturn la même année. Nintendo sautera directement une génération technique avec la sortie d’une console 64 bits en 1996, la Nintendo 64 (ou Ultra 64 #PourCeuxQuiSavent). On passe du support cartouche au CD (sauf chez Nintendo), les vibrations, les cartes mémoires apparaissent (elles existaient déjà sur la NeoGeo AES ^^)

Les années 2000 : la consécration du secteur

Dans les années 2000, les jeux vidéo gagnent le statut de loisir au même titre que le cinéma.

Les boutonneux des années 80 sont devenus de jeunes adultes et n’ont pas abandonnés leur passe-temps.

Pour preuve, l’arrivée de la Playstation 2 en France a suscité un engouement tellement important qu’il était devenu indéniable qu’il ne s’agissait plus d’un art mineur.

Emeute lors de la sortie de la PS2 au Virgin Mégastore des Champs-Elysées en 2000

Les années 2000, c’est aussi la démocratisation d’internet, aux Etats-Unis et au Japon notamment.

PS2 et Dreamcast sont équipés d’un port Ethernet et on découvre le jeu en ligne sur console. Microsoft met également le pied avec la première Xbox (enfin, les deux pieds quand on se rappelle la taille de la manette Fat), évidemment équipée d’un accès hardware à internet.

Sur PC, on s’adonnait déjà au jeu en réseau via LAN et dès la fin des années 90, le online était adopté sur cette plateforme.

S’ensuit la génération PS3/Xbox 360/Wii qui est pensée connectée : premières consoles avec mises à jour réseau, création des abonnements PSN et Xbox Live notamment. Et pour ceux qui s’en rappellent, Sony lança en 2008 l’un des premiers metaverse, le Playstation Home (qui est en passe d’être ressuscité).

Depuis 2000, les studios dits « AAA » se sont consolidés, l’offre de jeux vidéo ne cesse de croitre, pour une demande toujours plus forte.

En parallèle, depuis 2010, les studios indépendants prennent de l’ampleur. Grâce à la mode du Pixel Art, aux envies d’un gameplay plus difficile et la tendance retro-gaming, ces studios s’adressent à un public plus varié, tout en ayant besoin de moins de cash pour développer (bah oui, ça coute beaucoup plus cher d’avoir un jeu full 3D, bourrés de cinématique qu’un jeu en 2D pixelisé).

Les années 2000 ont vu les jeux vidéo atteindre le rang de 10ème art. L’industrie génère dorénavant plus de revenus que le cinéma. Ce dernier est d’ailleurs devenu une extension de l’art vidéoludique puisque nombre de films à succès sont issus d’œuvre jouables.

Le bouleversement Internet

Avant internet, jeu vidéo rime avec plaisir solitaire

Jusqu’aux début des années 2000, les jeux vidéo étaient essentiellement solo. Evidemment, depuis toujours, il y a des jeux multijoueurs (Pong en est l’exemple parfait) mais force est de constater que les grandes œuvres, notamment sur console, étaient orientés solo (même si Track & Field 2 sur NES, Garou MOTW sur Neogeo, ISS sur Super Nintendo etc…. sont exceptionnels).

Les PCistes citeront évidemment Doom, Populous et autres Command and Conquer : nous sommes d’accord…. Mais les LAN parties étaient loin d’être mainstream et simples à mettre en œuvre. Les Point&Click (la trilogie Kyrandia, les jeux Lucas Arts, Myst), les simulations de vols (Flight Simulator, Tie Fighter etc.) qui ont fait la fierté des joueurs PC et se jouaient seul.

Avant internet, la performance se mesurait surtout au High Score et Time Attack lorsqu’on ne pouvait pas affronter un autre joueur.

Internet va chambouler le secteur et lui donner ses lettres de noblesse.

L’avènement du multi online et du e-sport

Internet a profondément modifié l’industrie vidéoludique, d’abord par le mode online.

Les joueurs PC en sont les premiers bénéficiaires : il ne s’agissait plus de jouer seul, isolé mais avec des inconnus, à travers le globe, à n’importe quel moment du jour ou de la nuit. Très rapidement, des jeux initialement solos tel que les doom-like (ancien nom des FPS) deviennent uniquement multi : je me souviens avoir découvert Quake  3 Arena… avec des bots, faute de connexion internet.

Grâce à internet, on retrouvait ses copains après les cours pour jouer ensemble, créer une team et collaborer pour avancer dans un jeu.

Avant, on s’affrontait dans les salles d’arcade en posant sa pièce sur la borne pour défier le champion local. Grâce à internet, les champions (mon idole : Daigo The Beast) pouvaient désormais très bien vivre de leur passion à l’échelle internationale.

L’essor du e-sport est intimement lié à Internet : les jeux compétitifs, dédiés au multi ont commencé à passionner des millions de joueurs à travers le monde. Grâce au streaming vidéo, la scène e-sport s’est rapidement professionnalisée. Les plus jeunes ont commencé par LOL mais déjà en 1998, Starcraft faisait vivre des Pro Gamers (PGM) sud-coréens.

Finalement, il n’était plus nécessaire de sortir de chez soi pour jouer, le monde était dans notre salon.

Les jeux vidéo, c’est pour les gamins ?

Il aura fallu moins d’un demi-siècle pour transformer un loisir balbutiant en un art à part entière. Du statut de « grand mal pour la jeunesse » (loisir qui rend les enfants associables, violents et épileptiques), il est devenu un loisir mainstream et confidentiel à la fois, accessible et complexe, doté d’une riche culture.

Cette page d’histoire terminée, entrons dans le vif du sujet qui vous amène sur HelloToken : les NFT et les jeux vidéo, une nouvelle histoire d’amour qui va durer.

La révolution blockchain entre dans le gaming

Préambule : Comment les créateurs de jeux vidéo gagnent leur vie ?

Il nous semble nécessaire de présenter rapidement les business model dans l’industrie vidéoludique pour mieux comprendre la révolution que nous sommes en train de vivre.

Comme précité, de la préhistoire des jeux vidéo aux années 90, l’arcade faisait vivre les créateurs : à l’instar des bandits manchots, les bornes avalaient les pièces. Grâce à un subtil dosage de difficulté, timer et gameplay, l’exploitation des jeux dans des lieux publics étaient particulièrement rentable.

Dès les années 80 et l’essor des consoles de salon, la vente de cartouches viennent compléter ce modèle. Des studios développent des jeux exclusivement pour être joués à la maison. A cette période, l’industrie oscille autour des 50 milliards de dollars, consoles, arcade, PC confondus.

Ce modèle de vente retail sera bousculé par l’arrivée d’internet : le online, les abonnements (PSN, Xbox Live), les season pass, les extensions, DLC, micro-transactions, les loot-boxes etc. Grâce à cette évolution technologique, les éditeurs acquièrent de nouvelles sources de revenus, en dehors de la vente de leur jeu.

Au niveau de la distribution sur PC, une plateforme a sévèrement concentré l’offre : Steam.

D’un simple complément à Counter-Strike, Le soft de de Gabe Newell est devenu incontournable depuis son lancement en 2003. Le modèle « distribution/royalties » s’est rapidement imposé et si en 2021, la concurrence est présente, Steam domine encore largement le monde PC.

Une autre révolution technique a fait bondir l’industrie : le mobile.

Le « free-to-play » est né sur mobile, le farming est devenu un sport très accessible voire littéralement un emploi (qui se souvient des armés de farmers sur mobiles des années 2010 ?), puis rapidement, le « pay-to-win » est apparu.

Ces dernières années, c’est le Cloud Gaming qui concentrent les investissements de l’industrie : Les GAFAM sont venus challenger les ténors. Offrant un accès direct aux jeux via un catalogue sur abonnement, c’est la promesse pour le consommateur de ne plus s’encombrer d’un appareil dédié (PC/console) et bénéficier d’un large catalogue de jeux AAA récents.

Ce faisant, on assiste à une tentative de holdup sur l’ensemble de la chaine de valeur.

Quand la blockchain s’en mêle : les applications dans le gaming aujourd’hui

Le play-to-earn

Jusqu’alors, sauf être professionnel, jouer aux jeux vidéo était un loisir coûteux, du moins non rémunérateur.

La blockchain, via le modele Play-to-earn promet un changement de paradigme : jouer pour gagner… de l’argent en monnaie sonnante et trébuchante (si tant est qu’on imagine le tintement d’une crypto-monnaie).

En effet, des jeux tels que les populaires Thetan Arena ou Axie Infinity permettent de récupérer des cryptos pouvant ensuite être utilisés pour acheter des assets, être échangés voire swappés dans une autre devise numérique ou FIAT.

Si vous voulez approfondir le sujet du play-to-earn, notre invité Ahri a écrit un article très intéressant : « Play To Earn (P2E) : un rapide état des lieux ».

Les NFT : la promesse de la propriété numérique

Imaginons : vous êtes un joueur de WOW, level 60. Evidemment, vous avez passé des milliers d’heures et sûrement, dépenser quelques kopeks (ou beaucoup) pour posséder des items précieux (ou payé des farmers pour leveler pendant vos heures au bureau). Après quelques années passées, lassé, vous vous laissez séduire par Fortnite. Vous achetez des skins pour personnaliser votre avatar, des pioches, revêtements et autres joyeusetés esthétiques.

En 2030, Epic décide de fermer les serveurs de Fortnite.

Vous voyez où nous voulons en venir ?

Les assets accumulés tout au long de votre vie de gamer, à la sueur de vos doigts et de votre portefeuille, sont en réalité dépendants de la volonté de l’éditeur du jeu.

L’introduction des NFT dans les jeux vidéo apporte une des caractéristiques principales des smart-contracts : le droit de propriété.

La promesse est la suivante : comme IRL, les achats virtuels sont désormais doté d’un droit de propriété indiscutable, inviolable et pérenne. Les joueurs pourront désormais exposer leurs possessions en dehors du jeu, les échanger, les vendre mais aussi, de bénéficier d’éventuels avantages rattachés à leur NFT.

Pour les éditeurs, cela pose les bases d’une évolution importante dans leur business model : la vente existera toujours mais le champ des possibles est largement plus important.

Les NFT permettent d’imaginer des expériences, digitales ou physique uniques : visiter une nouvelle map en avant-première, rencontrer les développeurs du jeu IRL ou même, dans le jeu. Le potentiel est énorme !

Mais pour l’instant, en tant que gamers, nous estimons que le P2E, en apportant une brique blockchain/cryptos-monnaies aux jeux vidéo, ne révolutionne pas encore le gameplay.

Reconnaissons que Sorare, Top Shot et bientôt MetaFight ont largement dépoussiéré le trading card game traditionnel en faisant revivre le concept des paninis de notre enfance (même si à la rédac’, on est toujours aussi fébrile devant une carte Dragon Ball Z Super Jumbo Cardass 😍). On imagine sans mal Pokémon être tokenisé à l’avenir…

Cependant, nous attendons encore de voir comment la chaine de blocs et les NFT pourront impacter l’art vidéoludique en profondeur. Cela pourrait se traduire par :

  • Aller plus loin dans l’aspect social
  • Allonger la durée de vie des jeux, voire de les rendre interopérables via des transferts d’assets entre une suite de jeux de différentes générations (ex : récupérer les Matérias de FF7 et les coupler avec les Aptitudes de FF8)
  • Adosser des expériences IRL via des récompenses adossées à des NFT, à l’instar d’initiatives dans le Generative Art ou la musique
  • Mettre sur une blockchain un jeu existant pour organiser un tournoi mondial, permanent et perpétuel. Ex : créer un Pac-man blockchain et inscrire au panthéon mondial et public le ranking highscore

Conclusion : décembre 2021, un major entre dans le game NFT

Au moment de la rédaction de cet article, Ubisoft vient d’annoncer le lancement de Quartz, sa plate-forme NFT, basée sur Tezos (double Cocorico !!).

Après 2 ans d’initiatives indépendantes dans l’industrie, c’est le premier éditeur mondial qui ouvre le bal des NFT.  De notre point de vue, c’est un signal extrêmement fort. En effet, l’industrie vidéoludique trouve son socle dans un point essentiel : la qualité des jeux.

Loin de nous l’idée qu’un excellent jeu soit nécessairement sortie d’un studio AAA (on a adoré Blasphemous par exemple) mais pour faire accélérer le mouvement, un acteur comme Ubisoft était nécessaire. Le papa d’Assassin’s Creed, Far Cry, Just Dance, Rayman (et distributeur de la NeoGeo dans les années 90 en France, merci M. Guillemot) sera sûrement un acteur majeur dans le mariage des NFT et du gaming.

Nous sommes persuadés que la chaine de blocs et les NFT apportent une révolution et la résistance du secteur en est une preuve.

Steam, en tant que modèle ultra centralisé, voire monopolistique, a une position anti-NFT. En octobre 2021, la plateforme a interdit « Les applications construites sur la blockchain qui émettent ou permettent l’échange de cryptomonnaies ou de NFT sont interdites ». Est-ce un risque pour la poule aux œufs d’or de Valve ?

Au terme de cet article, nous avons conscience d’avoir abordé une multitude de facettes en dehors des NFT (on aurait même pu s’épancher sur les canaux de distribution, l’évolution de la consommation, le gameplay ou l’évolution du sprite de Joe Higashi entre Fatal Fury I et KOF 2003).

Cependant, le secteur du jeu vidéo est intimement lié à la technologie et passer à côté de son histoire aurait été dommage. Cette industrie est en train de vivre une révolution et si, comme nous, vous aimer les jeux vidéo et êtes curieux de leur évolution à l’aune des NFT, nous espérons que vous avez apprécié cet article (que nous reconnaissons « légèrement » fleuve ^^,).

Dites-nous tout en commentaires, on vous répondra avec plaisir et passion !

Dominique PRASIVORAVONG

Geek depuis (trop) longtemps, 1er PC : 286 à 16Mhz 🚀 Artiste martial (Taekwondo BB 🥋, Muay Thaï 🥊) #Sport #Bagarre. Amateur de tocantes ⌚ Accessoirement double profil Finance/RH 🤓 Trop curieux pour être simplement ce qu'on attend de moi.

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